L'autre jour, je suis tombé par hasard sur un reportage à la télévision, de ces reportages qui vous redonnent foi en la nature humaine, qui tiennent cette lueur d’espoir si ténue encore allumée, qui vous font penser que l’avenir s’annonce finalement radieux pour l’humanité !
Installé confortablement devant mon poste – c’est-à-dire complètement avachi, les jambes pendant mollement du lit, le regard alerte et plein d’intelligence du bulot cuit, la cervelle comme anesthésiée au Lexomil (tiens, je me rends compte que je viens de décrire l’état normal de Lance…), bref, un type normal devant sa télé, quoi – un titre accrocheur me tira soudain de ma torpeur hypnotique : « […] aux Etats-Unis, une ville habitée uniquement par des enfants […] ». Amusé et intrigué, je tendis l’oreille.
Et alors, ô merveille, je découvris un monde fabuleux, comme seule l’imagination de l’homme peut créer. La ville se nomme Wannado City (rien à voir avec notre Orange national) et s’avère être en fait une sorte de parc d’attraction géant d’un nouveau type : une ville entière où tous les corps de métier sont occupés par des enfants, du policier au banquier, en passant par le cuisinier ou l’ouvrier voire même le mineur (sans jeu de mots…).
On y apprend à ces chères têtes blondes – notre avenir – à travailler pour pouvoir gagner de l’argent (la monnaie locale étant le womba si je ne m’abuse) et aller gentiment le déposer à la banque, pour ensuite pouvoir consommer, bref à devenir un bon petit capitaliste dévoué et obéissant. On nous montre aussi l’un des rares adultes (enfin, adulte, entendons-nous : 18 ans tout juste !) : le chef de la police, fier de nous faire visiter la prison avec sa cellule aux barreaux de mousse (mais oui enfin, ce ne sont point des sadiques !) où séjournent les petits mécréants qui s’écarteraient du chemin balisé. N’est-ce point magique, féérique, paradisiaque ? Et dire que nous, pauvres enfants ignares et malheureux, nous jouions stupidement aux cow-boys et aux indiens, à chat-perché, à cache-cache, à explorer les terres exotiques, lointaines et inconnues que devenaient, le temps d’une journée, le jardin ou la forêt du coin ! En compagnie de nos bandes de copains, nous réinventions le monde à notre image, sans autre limite que notre imagination débordante. Las, qu’avons-nous manqué ! J’envie les enfants d’aujourd’hui de pouvoir plonger dans ces mondes fabuleux créés pour eux par des adultes sages et soucieux de leur devenir qui leur montrent la voie à suivre consciencieusement.
Moi, d’ordinaire enclin à la misanthropie aigüe, je fais ici mon mea culpa. Homme de peu de foi que je suis ! Moi qui te pensait, Homme, si misérablement enclin à une perversité et une débilité incoercibles, je te demande pardon et m’incline humblement devant cette démonstration de ton génie, de ta grandeur d’âme et de ce que tu peux avoir de meilleur en toi !